Le reverse mentoring, qu’est-ce que c’est?
Le reverse mentoring – ou tutorat inversé – bouscule les codes du management et permet aux différentes générations de mieux interagir.
En septembre, du haut de ses 24 ans, Sophia Lim est devenue… présidente du Groupe Adecco. Certes, en tandem et pour une durée d’un mois seulement. Dans le cadre d’un programme de reverse mentoring, la jeune femme a eu l’opportunité de travailler avec son PDG, Alain Dehaze, de l’accompagner en rendez-vous clients et de participer aux revues opérationnelles du monde entier. « Cet apprentissage pratique constitue l’une des meilleures façons pour ma génération de s’initier aux postes de direction et de préparer la relève », observe l’intéressée.
Reconnaître ses limites, une nécessité pour les manageurs
« Si l’expérience m’a appris quelque chose, c’est qu’il faut parfois accepter de dire que l’on ne sait pas. Le manageur n’est plus un surhomme. » Fondateur de la société Ethikonsulting, Frédéric Rey-Millet forme les manageurs à quelques bonnes postures. Et d’autant mieux qu’il parle d’expérience. Lui-même s’est remis en question au moment de la crise de 2008. « Nous aurions pu mettre la clé sous la porte, car nous avions perdu 50 % de notre chiffre d’affaires. Or, je ne m’en serais jamais sorti seul. »
Fier d’avoir gardé son entreprise et ses emplois, cet entrepreneur privilégie désormais l’humilité et le collectif. « Il faut parfois admettre que l’on ne sait pas et que l’on a besoin d’aide, poursuit le co-auteur du livre Management Game (ed. Leduc). J’ai été très marqué par une conférence Vineet Nayar, le CEO du groupe HCL Technologies. Il racontait que, quand il a repris HCL, il a réuni ses dirigeants pour leur dire qu’il n’avait aucune vision figée pour l’entreprise. Dans le doute, il a sollicité leurs avis. »
Reconnaître ses limites pour favoriser la créativité
Tous les manageurs s’en doutent : ils ne savent pas tout. Mais, peu à peu, davantage l’admettent sans perdre leur aura pour autant. Présidente du directoire du groupe Scarabée Biocoop, Isabelle Baur s’est ainsi ouverte à une communication et à un management plus horizontaux. « Personne n’est enfermé dans son secteur et les propositions créatives peuvent venir de partout, résume-t-elle. Nous avons confiance et l’on observe déjà que les salariés sont plus engagés, épanouis et motivés. » L’époque et le mythe du manageur omnipotent et « je-sais-tout » ont vécu.
La communication interne pour faire bouger le management
Comment accompagner la transformation d’un secteur comme l’expertise-comptable, et promouvoir par la même occasion certaines techniques de travail ? En osant communiquer autrement…
Si l’on vous parle de « cabinet » : quelle image vous vient immédiatement à l’esprit ? Est-ce un cabinet de toilette ? Un cabinet ministériel ou encore de médecin ou de dentiste ? Le premier épisode de la série « Osons changer », baptisé « Adieu cabinet», met ainsi à l’écran les différentes représentations qu’il est possible d’avoir. Il fallait frapper fort et Marie-Hélène Gebhardt se réjouit du résultat. « Je fais partie du groupe de travail communication chez France Défi, et avec le groupe de travail dédié aux ressources humaines, il nous a semblé important d’adopter de nouveaux outils pour accompagner nos collaborateurs dans la conduite du changement », résume la responsable communication & projets internes chez Axens.
Premier objectif, réussi : accompagner la mutation des « cabinets » comptables d’antan vers l’entreprise. « Il fallait quelque chose de décalé car, pour la plupart des personnes, les cabinets comptables ont une image un peu poussiéreuse qui ne correspond pas du tout à la réalité ni à l’ambiance qui peut y régner, ajoute notre experte. Cette démarche répond aussi à une autre exigence. Historiquement, la comptabilité est un métier assez solitaire et technique. Aujourd’hui la profession se transforme et la façon de l’exercer évolue. Un collaborateur partage la relation avec ses clients avec d’autres experts métiers. La structuration des cabinets s’est transformée en entreprise de services avec différentes expertises métiers dans l’intérêt de nos clients, Pour cette raison, nous devons accompagner nos équipes dans ce changement et séduire des profils davantage dans le conseil et la relation client. »
Liberté d’expression des salariés: un droit qui n’est pas illimité
A l’extérieur comme au sein de l’entreprise, la liberté d’expression est de mise. Mais la liberté d’expression des salariés a des limites et les excès peuvent entraîner des sanctions.
Critiquer l’organisation, se plaindre du management, pester contre des objectifs impossibles à atteindre… Les salariés en ont le droit ! « La liberté d’expression est consacrée par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ainsi que par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Et elle figure également dans le Code du Travail », rappelle l’avocate en droit du travail Dalila Madjid. Il y même précisé que « les salariés bénéficient d’un droit à l’expression directe et collective sur le contenu, les conditions d’exercice et l’organisation de leur travail ».
Liberté d’expression des salariés: tout est question de mesure
Pour autant, tout est question de mesure et les collaborateurs passant les bornes peuvent être sanctionnés, jusqu’au licenciement pour faute grave. La nature des propos eux-même doit donc être prise en compte. Ainsi des critiques argumentées, ne tombant pas dans l’excès, ne peuvent être reprochées à un salarié. A l’inverse, la diffamation ou l’injure, dans le cadre professionnel comme à l’extérieur, sont susceptibles de justifier un licenciement et de donner lieu à condamnation. Le contexte doit également être pris en compte. « Des propos vifs de la part d’un représentant syndical seront plus facilement tolérés dans le cadre d’un mouvement social ou d’une négociation collective, par exemple », remarque Dalila Madjid. Si les circonstances ont leur importance, la publicité donnée aux propos critiques l’est tout autant.
Comment motiver les « millennials »?
Les millennials, ces jeunes salariés de moins de 30 ans travaillent avec leurs aînés mais ne « fonctionnent » pas toujours pareil. Autant essayer de les comprendre pour mieux les booster.
Les millenials, une génération « ni perdue, ni ingrate » pour le cabinet Deloitte. Sa dernière « Millennial Survey », son étude annuelle consacrée aux collaborateurs de moins de 30 ans, tranche avec certains clichés. Ainsi, 31 % des sondés envisagent de rester plus de 5 ans dans leur entreprise, soit une augmentation de 6 % par rapport à l’année précédente.
Les millennials ne sont pas moins impliqués
« Contrairement à une idée reçue, les millennials ne sont pas forcément plus individualistes ni moins impliqués dans dans leur travail que les autres ! », commente Julien Pouget, associé au cabinet Yuman. Ce spécialiste en management intergénérationnel distingue globalement les « baby-boomers » qui n’ont pas connu le numérique en grandissant, la génération « X » qui s’y est formée et les « Y » et « Z », appelée aussi les « millennials », qui n’a connu que cela. « Conjoncture oblige, les plus jeunes, réputés plus agiles, sont cependant davantage dans des logiques d’expérience que de carrière. Ils apprécient leur autonomie et recherchent avant tout des expériences qui ont du sens. Il faudra en tenir compte dans le management au quotidien. »
Management intergénérationnel: les clés pour réussir
Difficile de s’y retrouver entre ces différentes générations estampillées X, Y et Z. Elles ont pourtant quelques caractéristiques qu’il vaut mieux comprendre pour qu’elles cohabitent au mieux en entreprise.
Une entreprise et plusieurs générations… Pour Julien Pouget, spécialiste en management intergénérationnel au cabinet Yuman, avant de mettre en place cette gestion d’équipe. « La première clé du management intergénérationnel est d’avoir à qui on a affaire. Globalement, on distingue les baby-boomers qui n’ont pas connu le numérique en grandissant, la génération X qui s’y est formée et les Y et Z, appelée aussi les « millenials », qui n’ont connu que cela. » Pour autant, la différence entre ces profils ne se cantonne pas à leur connaissance du numérique. « Il faut se dire que ces collaborateurs n’ont pas grandi sans le même contexte.
Cela se ressent notamment dans le rapport au travail. Conjoncture oblige, les plus jeunes, réputés plus agiles, sont davantage dans des logiques d’expérience que de carrière. Ils recherchent avant tout des expériences qui ont du sens. Cela ne signifie pas qu’ils seront moins impliqués dans leur mission, mais c’est un rapport au travail qu’il faut comprendre, avec un horizon plus court, mais aussi un besoin d’autonomie plus grand et un rapport différent à la hiérarchie. »
Holacratie: un exemple d’entreprise « libérée »
Aux antipodes de nos hiérarchies pyramidales classiques, l’holacratie intéresse de plus en plus d’entreprises. Illustration du management dit « libéré », elle implique une nouvelle organisation plus collaborative.
Fatigués par les lourdeurs des entreprises dans lesquelles ils avaient travaillé, Brian Robertson, Alexia Bowers et Anthony Moquin, décident de créer, une société basée sur une philosophie dite « agile ». Ainsi né ,aux États-Unis dans les années 2000, le concept d’holocratie. « L’holacratie se résume tout simplement à une nouvelle pratique sociale, explique Bernard-Marie Chiquet, fondateur d’IGI Partners et promoteur de cette innovation managériale en France. Le management est actuellement basé sur l’idée d’une subordination à une organisation hiérarchique. Or, on peut réfléchir autrement. L’holacratie est ainsi basée sur une idée toute simple : c’est celui qui sait, qui fait. » Autrement dit, l’entreprise n’est plus un organigramme mais une addition d’autorités individuelles, organisées au sein de cercles dotés chacun d’une large autonomie, pour leur permettre ensemble d’atteindre au mieux les objectifs de l’entreprise.
Le codéveloppement, se former par l’intelligence collective
Lancé en France depuis dix ans, le codéveloppement est une méthode de formation innovante qui séduit de plus en plus de salariés. Son but: apprendre à grandir ensemble, entre pairs.
Dans une autre vie professionnelle, Anne Hoffner a vécu au Canada. « J’y ai passé six ans et je me suis beaucoup intéressée à leurs méthodes de travail beaucoup plus collaboratives que les nôtres », se souvient cette ancienne chef de projet. Une idée qui va faire son chemin : Anne Hoffner s’intéresse notamment aux travaux d’Adrien Payette, fondateur avec Claude Champagne, d’une méthode de codéveloppement professionnel et managérial. « J’ai découvert un dispositif de formation innovant parce qu’il se fait entre pairs qui vont échanger pendant une période déterminée, s’intéresser à des sujets les concernant et se développer ensemble. » En 2004, quand Adrien Payette se prépare à prendre sa retraite, Anne Hoffner et son associé, Dominique Delaunay, passent six ans à ses côtés pour adapter sa méthode au public français et fondent l’Afcodev(Association française du codéveloppement).
Quel type de manageur êtes-vous?
Quel type de manageur êtes-vous?
Avant d’affiner sa posture managériale, mieux vaut savoir d’où l’on part. Si le manageur « délégatif » est largement plébiscité aujourd’hui par les salariés, d’autres profils existent…
Le manageur « autocrate »
« C’est un type de management autoritaire de plus en plus dépassé », résume Stéphane Lambert. Expert-comptable chez Michel Creuzot et vice-président du groupement France Défi, il a beaucoup réfléchi à la question, notamment après avoir lui même repris un autre cabinet. « De façon familière, on pourrait dire que l’autocrate manage « à la schlague ». Il préfère des collaborateurs soumis et n’encourage pas leur sens critique. Mais ces exécutants ne le quitteront-ils pas à la première occasion ? » Consultante en management chez Ethikonsulting, Isabelle Rey-Millet acquiesce. « On sait aujourd’hui que l’engagement et la fidélisation des salariés tient pour beaucoup à l’autonomie qu’on leur laisse. C’est dans l’intérêt des entreprises car les résultats s’en ressentent. »
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4 conseils pour faire évoluer sa posture de manager
On ne naît pas manageur: on le devient. Et il faut souvent du temps pour trouver la bonne posture mais aussi pour ne pas rester figé. Petits conseils pour évoluer quand il le faut…
Regarder autour de soi. Philippe Guermeur en est bien conscient : les temps changent. Et le constat vaut autant pour la posture des manageurs que pour les attentes des collaborateurs. « Je n’ai plus du tout aujourd’hui la même posture qu’à mes débuts, témoigne le président du cabinet Gadras et associés, également président du groupement France Défi. L’expérience joue. On voit bien, autour de soi, que l’heure n’est plus aux manageurs très directifs ou paternalistes que l’on a pu connaître. » De façon naturelle et pragmatique, lui même a adopté un modèle participatif plébiscité par le plus jeunes. « Il y a déjà, chez le manageur, une posture qui évolue au fil de l’eau et s’installe normalement, si l’on garde l’esprit ouvert, avec l’expérience. »